Acrylique sur toile

« Les partitions de l’inconscient »

« Aucune règle n’existe, les exemples ne viennent
qu’au secours des règles en peine d’exister. »

André Breton

L’écriture atonale est à la musique ce que l’abstraction lyrique est à la peinture : une échappée hors des formes classiques ; une excursion hors du royaume de la conscience. En jouant des couleurs comme d’autres jouent avec les forces de la nature pour en extraire des métaphores, Jean-Philippe Estebenet entraîne la peinture dans une danse extatique et folle où le fond, naguère support de la forme, reprend le dessus et clame son droit à devenir le sujet d’une figure informe – d’une figure sans contours fixes et sans essence.

Mais dans ce monde mouvant, flottant et sans attache, la notion d’ordre n’est pas pour autant absente. Des flux qui s’entrechoquent, elle émerge et impose sa présence comme si, des éléments en apparences épars qui recouvrent la toile, ne pouvait germer qu’une seule organisation absolument consistante – qu’une seule chaosmose. A l’instar des maelströms et des cyclones, les peintures de Jean-Philippe Estebenet possèdent toutes un centre de gravité autour duquel gravitent les débris de leur coalescence.

Et si, à l’instar des dernières recherches en physique quantique, les peintures de cet artiste nous donnaient à voir ce qui sous-tend le monde visible : non pas le monde stable des atomes, mais les vrilles et les tourbillons de matières subtiles qui composent le soubassement de tout phénomène en devenir ou sur le point de se rompre.

 

Frédéric-Charles Baitinger